Le tamisage des naissances
Grégory Katz-Bénichou
Depuis les temps bibliques où l'infécondité de Sarah fut corrigée d'un miracle qui la rendit pleine de vie (Gn 21, 2), la question de la stérilité a marqué de son sceau l'histoire de l'humanité. De nos jours, l'assistance médicale à la procréation (AMP) offre une solution aux couples stériles. Or, bien qu'elle ait été initialement destinée à corriger l'infécondité, la procréation artificielle s'est progressivement réorientée vers une seconde indication : éviter les naissances anormales . En effet, l'AMP nécessite de produire en nombre des embryons humains conservés dans des éprouvettes. Avant de les transférer dans la matrice utérine, parents et médecins n'hésitent plus à sonder leur qualité génétique afin de repérer les meilleurs spécimens. Car à quoi bon soigner les oeufs déficients puisqu'il est possible de sélectionner directement les sains dans des éprouvettes voisines ? La maîtrise des diagnostics génétiques offre une seconde ambition à la procréation médicalisée : l'orthogénie , c'est-à-dire l'action dirigée de faire naître des enfants sans handicap . Le croisement de deux médecines - l'une procréative, l'autre prédictive -, achève de concrétiser la vision du généticien Francis Crick, découvreur de la structure de l'ADN : « Aucun enfant nouveau-né ne devrait être reconnu humain avant d'avoir passé un certain nombre de tests portant sur sa dotation génétique. S'il ne réussit pas ces tests, il perd son droit à la vie »1.
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(1) Francis Crick, cité par Pierre Thuillier, La recherche, n°155, mai 1984.
Nb : la totalité de cet article est disponible dans la version
papier de Cités. |