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  Dossier : Guerres et menaces de guerres
Quel espoir de paix au XXIe siècle ?
 
 

Quand guerre et paix s'emmêlent.
Géopolitique des espaces
imaginaires contemporains


Jackie Assayag


« Pour se représenter une situation inconnue l’imagination emprunte des éléments connus et à cause de cela ne se la représente pas. Mais la sensibilité, même la plus physique, reçoit comme le sillon de la foudre, la signature originale et longtemps indélébile de l’événement nouveau ».
Marcel Proust, Albertine disparue.

Depuis deux cents ans au moins, la distinction entre un « intérieur », dans lequel les valeurs de la démocratie et de la liberté se propagent, et un « extérieur », qui n’est jamais prêt à les recevoir, a conduit les pays occidentaux à exercer une violence « bienveillante » au travers de la colonisation. L’objectif affiché était de « civiliser » les indigènes. Tel fut le « fardeau de l’Homme blanc ». Supportée au nom de la mission civilisatrice de l’Occident et inspirée par l’eschatologie, cette vocation valait promesse de rédemption tant pour le colonisateur que pour le colonisé. Mais le dessein de rendre les « autres » meilleurs se conjuguait avec une volonté de puissance ou de croisade qui imposait à tout le moins une réforme, sinon une refondation de leurs (non) institutions. Ce régime de discours et de pratiques caractérise le colonialisme dans ses relations profondes avec les organisations politiques, y compris lorsque celles-ci étaient démocratiques.
La « guerre déclarée au terrorisme » après le massacre du 11 septembre 2001 à New York, avec les opérations militaires subséquentes en Afghanistan et en Irak, renoue avec cette tradition d’interventionnisme mélioratif en charriant les vieux topoï orientalistes afférents ; conquêtes par les Britanniques de l’Afghanistan à partir de 1823, de l’Irak en 1917-18, de la Palestine en 1917. Loin d’effacer le Grand partage entre l’Ouest et le « Reste », les guerres présumées d’un type nouveau renforcent et polarisent la division entre « civilisés » et « barbares » à l’ère dite de la « globalisation ».

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Cet article a été rédigé en 2004.

Nb : la totalité de cet article est disponible dans la version papier de Cités.