Sartre
et l'existentialisme noir
Lewis Gordon
De nombreux philosophes noirs donneraient cher pour avoir pris un café
avec Jean-Paul Sartre. Si nous en avions la possibilité, beaucoup
d’entre nous commenceraient par le remercier de son courage. Il
a lutté non seulement contre les forces anti-humaines de la société
française et de la société américaine, mais
aussi contre ces forces en lui qui proposaient toujours la séduction
d’une solution facile. Beaucoup d’entre nous se demandent
également si ses critiques universitaires et politiques actuels
seraient capables de défendre les valeurs auxquelles ils croient
s’ils étaient menacés comme lui l’était
lorsqu’il défendait celles auxquelles il croyait. Rappelez-vous
ce triste moment, cinq mille anciens combattants qui défilèrent
sur les Champs Elysées en 1960 en criant « A mort Sartre ! »
en réaction au soutien qu’il apportait à l’indépendance
algérienne. Rappelez-vous les menaces de mort et les tentatives
d’assassinat dues à l’OAS, qui plastiqua son appartement.
Rappelez-vous son refus de voyager aux Etats-Unis pendant la guerre du
Vietnam. Enfin, rappelez-vous son refus du Prix Nobel de Littérature,
pour la raison qu’il n’appartenait à aucune institution.
Il maintenait ses positions, du mieux qu’il pouvait, ce qui, pour
un être humain, ne pouvait être que de manière imparfaite.
Malgré lui, il appartenait à cette espèce rare des
athées religieux qui voulaient faire face au monde sans le soutien
de Dieu.
(...)
Nb : la totalité de cet article est disponible dans la version
papier de Cités.
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