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  Dossier : Les constitutions possibles de l’Europe
Figures politiques de l’Europe unie
 
 

Destins de l'utopie fédéraliste

Frédéric Rouvillois


L'idée d'une Constitution européenne — c'est-à-dire, le projet d'établir une Europe fédérale sur le modèle classique de l'État composé — peut s'envisager de deux manières distinctes : sous un angle général, celui de la possibilité d'une telle fédération, mais aussi sous l'angle particulier des « États membres » susceptibles de composer cet ensemble — et en ce qui nous concerne, sous celui de la France.
Angle particulier ? Très particulier, même, dans la mesure où en France, le pouvoir politique et la nation ont toujours entretenu des relations singulièrement étroites. D'un côté, en effet, c'est l'État capétien qui, siècle après siècle, a construit patiemment le pré carré et la nation France. De Bouvines au traité de Troyes, du sacre de Reims à la Libération de Paris, les étapes constitutives de la nation française ont toujours été de grandes dates politiques, correspondant à des victoires, à des avancées ou à des reculs de l'autorité souveraine. Réciproquement, il a toujours été entendu que celle-ci devait participer de la nation, en être issue : « l'en ne doit pas avoir roy d'estrange nation », déclare Nicole Oresme au XIVe siècle. Tel est le sens de la « loi salique » qui excluait les filles de la succession au trône pour éviter qu'un étranger ne devienne, en les épousant, roi de France : « le royaume des lys ne tombe pas en quenouille ». Car c'est « une chose aussi comme hors nature que un homme règne sus gent qui n'entendent pas son maternel langage ».

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Nb : la totalité de cet article est disponible dans la version papier de Cités.