Art
et violence urbaine
Carole Talon-Hugon
Dans le tableau de Lucas Cranach l'Age d'or (vers 1530), l'humanité
primitive connaît le bonheur non dans une ville mais dans un jardin.
Toutefois, l'Ancien Testament, s’il s'ouvre sur le jardin d'Eden,
s'achève sur la perspective de la ville, en l'occurrence la Jérusalem
nouvelle dont parle Ezéchiel (40-48). La cité par opposition
non pas au jardin cette fois, mais au chaos de l'état de nature,
incarne et réalise l'accord de l'état social. Toutes les
utopies sont là pour l'attester : des projets de Thomas More (l'Utopie,
1516) à ceux de Robert Owen (créant New Harmony aux États-Unis
en 1825), en passant par les villes idéales de Campanella, de Francis
Bacon et de Claude Nicolas Ledoux, toutes font de la ville ainsi que le
dit Henri Lefèbvre « le lieu même de l'urbanité
», où biens et personnes circulent en sécurité.
Mais précisément, ne s'agit-il pas là d'utopies,
et les villes sont-elles vraiment issues de la raison humaine, et propices
à l'entente raisonnable de ceux qui l'habitent ? Le problème
récurrent de la violence urbaine n'invite-t-il pas plutôt
à regarder du côté de la Genèse qui lie violence
et fondation de la première ville en attribuant celle-ci à
Caïn après qu'il eut tué son frère Abel (Genèse,
4-17) ?
(...)
Nb : la totalité de cet article est disponible dans la version
papier de Cités.
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