Sommaire général
 
  Dossier : L’utilitarisme aujourd’hui
Une philosophie du bonheur ?
 
 

Utilitarisme et Éthique publique :
le débat avec Rawls


Catherine Audart


Le débat typiquement « anglo-saxon », que Rawls a mené, dans les années 70, avec les utilitaristes, en particulier avec John Harsanyi, a-t-il, pour le public français, une pertinence quelconque? En apparence non, puisque l’utilitarisme n’a jamais eu vraiment d’impact sur la pensée et la pratique politiques en France, et que la pensée de Rawls, pour beaucoup, reste marquée du stigmate de « libérale », ce qui l’a empêchée d’avoir, jusqu’à présent, la diffusion qu’elle mérite. Je voudrais montrer qu’il a, en réalité, une grande pertinence.
Ce débat a été mené dans deux directions. Tout d’abord, Rawls condamne l’utilitarisme en tant que philosophie morale. D’autre part, il soutient que l’utilitarisme ne peut pas être accepté comme éthique publique d’une démocratie. C’est ce dernier débat qui nous occupera. Dans une démocratie, une part extrêmement importante du débat politique concerne la justification, non seulement rationnelle, mais également éthique, des décisions, ainsi que des institutions et des pratiques politiques. Cette justification fait intervenir non pas une religion commune ou une vision commune du bien, comme dans le monde pré-moderne, mais une éthique publique. Celle-ci a pour tâche de débattre et de justifier les principes et les normes, les fins et les « raisons » qui permettent de légitimer pratiques, institutions et décisions politiques et de constituer ainsi un consensus aussi large que possible grâce au débat public, malgré la diversité et l’incompatibilité même des systèmes de valeurs et des croyances des membres de l’association politique. On voit à quel point les enjeux en sont importants.

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Nb : la totalité de cet article est disponible dans la version papier de Cités.