Sommaire général
 
  Analyse du discours politique
 
 

La Gouvernance

Luc Borot


Dans la panoplie des néologismes calqués par notre langue sur l’anglais après que ce dernier, il y a plusieurs siècles, les lui eut empruntés, le mot « gouvernance » occupe une place de choix. Au nombre des euphémismes politiques dont les organisations internationales et les idéologues du marché masquent leurs tentatives de contournement de la légitimité démocratique, c’est l’un des plus ravageurs. Cependant, au-delà de l’ironie d’un politicien qui a récemment opposé « gouverner » et « gouvernancer » , comment comprendre la fortune étonnante de ce vocable et les équivoques qu’il entretient ?
Quand le mot governance apparaît en anglais au XIVe siècle, il est immédiatement chargé de connotations partagées entre le gouvernement politique et le gouvernement de soi. Ce terme pouvait désigner la charge d’un gouverneur, d’un souverain, d’un magistrat, le domaine sur lequel ils exercent cette charge, la façon dont ils pratiquent le pouvoir, mais aussi la maîtrise que l’on a de son comportement, de sa langue et de ses mœurs. Ce n’est qu’au milieu du XXe siècle, dans le langage des organisations internationales, que ce terme qu’avaient ignoré les théories républicaines de langue anglaise a trouvé un emploi d’une extrême plasticité. Aujourd’hui, qu’il s’applique aux gouvernements du Tiers Monde, aux ONG, aux entreprises ou au rapport entre gouvernement et société, il se substitue à des notions politiques appropriées.

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Nb : la totalité de cet article est disponible dans la version papier de Cités.