Lettre
d'Amérique. Les Trente glorieuses
de la pensée politique ?
André J. Bélanger
La fin des années 60, en Amérique du Nord, demeure, dans
l'imaginaire d'un bon nombre, une ère dominée par la contre-culture
où s'affichent une sexualité affranchie et un certain anarchisme
à prétention de gauche. C'est l'époque de la contestation
étudiante qu'alimente l'implication grandissante des Américains
au Viêt-nam. Or, comme en contrepoint, presque en opposition, prennent
forme, à cette époque, de nouvelles expressions en pensée
politique appelées à modifier définitivement le paysage
auquel nous étions habitués depuis assez longtemps.
Cette époque marque en Amérique un grand virage dans la
manière dont est engagée, par la suite, la réflexion
sur le politique. Le nom de John Rawls vient bien sûr à l'esprit,
mais, comme nous allons le voir, la mouvance d'ensemble dépasse
largement son nom. Car, en même temps, se précise la théorie
des choix rationnels qui, plus qu'une théorie, se présente
comme une démarche, presque un paradigme. Rawls lance donc sa conception
de la justice comme équité, à laquelle vont répliquer
Robert Nozick et David Gauthier, tous du sérail de la philosophie
analytique, prêts également à s'approprier, au besoin,
les apports de la théorie des choix rationnels. Avec eux triomphent
la démocratie libérale, ou libertaire, fondée sur
les droits de l'individu. Mais en même temps viennent s'interposer
les tenants de la vieille tradition républicaine, plus sensibles,
eux, au statut d'égalité des citoyens et à leur appartenance
à une communauté sociale ou civile. Voilà un débat
où les enjeux sont posés différemment suivant la
conception que les uns et les autres se font du statut de l'homme et de
la société, mais toujours, il va de soi, dans le cadre de
ce que tous conviennent d'appeler : la démocratie.
(...)
Nb : la totalité de cet article est disponible dans la version
papier de Cités.
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